Comment un Homme d’Affaires Russe a été Pris en Train de Livrer des Technologies de Pointe au Kremlin

Comment le FBI a déjoué les ambitions technologiques d’un homme d’affaires russe

Au sein de la vaste toile d’Internet, l’anonymat règne en maître, et nul ne sait qui se cache derrière un écran. C’est dans cet univers numérique que s’est joué un récit digne d’un thriller. Fin septembre, Maxim Marchenko, un homme d’affaires russe établi aux États-Unis, a été arrêté et poursuivi par la justice américaine. Officiellement, il se consacrait à l’exportation de filtres pour voitures, d’appareils électroménagers, et de produits alimentaires de l’Europe de l’Est vers la Russie. Mais les apparences sont parfois trompeuses.

Sous le couvert de ses activités légales, Maxim Marchenko acheminait secrètement vers son pays d’origine des micro-écrans OLED à très haute résolution et des puces électroniques. Ces opérations se déroulaient à travers une société basée à Hong Kong, selon les révélations du média indépendant russe The Insider. Ces composants technologiques, d’apparence anodine, cachent en réalité des implications bien plus profondes.

Les micro-écrans OLED, connus pour leur résolution exceptionnelle, offrent des avantages considérables. “La technologie des écrans micro-LED offre une résolution exceptionnellement élevée sur un petit écran –par exemple 1.280 x 1.024 pixels sur un écran de 0,8 pouce– plaçant la taille des pixels à environ 10 microns,” précise The Insider. Cette technologie est à double usage, conçue à l’origine pour une utilisation civile, mais peut être détournée à des fins militaires. Elle est employée dans les appareils de vision nocturne, les dispositifs de visée, et les lunettes tactiques.

vision nocturne

Le contexte géopolitique n’a fait que renforcer l’importance de ces technologies. À la suite de l’invasion russe en Ukraine, eMagin, un fabricant américain d’écrans micro-OLED, a établi un partenariat avec Alice Components, une société dirigée par Maxim Marchenko. Le représentant, nommé “Ami Chan,” était en réalité un employé dissimulé de l’entreprise russe OOO Infotechnika. Alice Components a prétendu que les micro-écrans étaient destinés à des “microscopes électroniques pour la recherche médicale en Chine, à Hong Kong, en Malaisie et en Europe.”

Cependant, l’embargo américain sur les exportations de semi-conducteurs vers la Russie compliquait la situation. Pour respecter les sanctions américaines, eMagin a expressément demandé à “Ami Chan” et à Alice Components de ne pas livrer les micro-écrans en Russie ni en Ukraine. La réponse à cette demande allait s’avérer cruciale.

En novembre, eMagin a informé son interlocuteur que la transaction ne pouvait pas avoir lieu directement. L’accord initial a été annulé, mais une proposition alternative a vu le jour : l’entreprise dirigée par Maxim Marchenko pourrait se fournir auprès d’un distributeur. En désignant la Chine comme destination finale, Alice Components a commandé 2 500 micro-écrans à ce distributeur. Cependant, ce dernier était en réalité une société-écran contrôlée par le FBI.

Le piège se referme, et les véritables acheteurs des micro-écrans, basés en Russie, ont commis une imprudence fatale. Ils ont suivi la livraison depuis leurs ordinateurs de travail sans prendre les précautions élémentaires, notamment l’utilisation d’un VPN. Les adresses IP ont révélé la source du suivi de la livraison, conduisant directement au fournisseur russe Granat, en lien avec le centre de recherche et de développement Cyclone, une filiale de l’entreprise d’État Rostec, un géant de l’industrie de la défense à Moscou.

Cette affaire met Maxim Marchenko dans une position délicate, confronté aux conséquences de ses actions. La technologie qui semblait prometteuse s’est finalement révélée être un piège soigneusement tendu par le FBI. Une histoire qui illustre que, dans le monde de la technologie et de la géopolitique, les frontières entre le commerce et la sécurité nationale sont plus floues que jamais.

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