Mercure dans le thon en boîte : un risque sanitaire ignoré ?

Santé publique en péril : la contamination au mercure dénoncée par deux ONG

La récente enquête de BLOOM fait éclater un scandale sanitaire majeur : chaque boîte de thon analysée contient du mercure, un métal lourd reconnu pour ses effets toxiques sur le système nerveux et les organes vitaux. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le mercure figure parmi les dix substances les plus préoccupantes, à l’égal de l’amiante ou du plomb. Les résultats des 148 conserves testées sont sans appel : 100 % des échantillons sont contaminés.

Thon et mercure : pourquoi cette contamination généralisée ?

La présence de mercure dans le thon s’explique par les pratiques industrielles et la chaîne alimentaire. Les rejets issus des combustions fossiles et de l’exploitation minière se retrouvent dans les océans, où ils se transforment en méthylmercure, une forme toxique. Les poissons situés au sommet de la chaîne alimentaire, comme le thon, accumulent de fortes concentrations de ce métal en consommant d’autres poissons. Si le taux maximal autorisé de mercure est de 0,3 mg/kg pour des espèces comme le cabillaud ou la sardine, celui du thon atteint 1 mg/kg, soit trois fois plus.

Une législation insuffisante ou complice ?

BLOOM met en lumière le rôle des autorités sanitaires et des lobbies dans l’établissement des seuils de contamination. Le seuil plus élevé pour le thon n’est pas basé sur des préoccupations de santé publique mais sur des intérêts économiques. Ce relâchement législatif autorise ainsi des niveaux de mercure élevés pour garantir la commercialisation d’une majorité de poissons contaminés.

Cette tolérance suscite de vives inquiétudes. En effet, une boîte de thon en conserve contient souvent plus de mercure que le poisson frais en raison de la concentration liée à la cuisson et à la déshydratation. Par exemple, une teneur de 1 mg/kg dans le thon frais peut équivaloir à 2,7 mg/kg en boîte, soit neuf fois plus que pour les espèces aux normes les plus strictes.

boîtes de thon en conserve testées par des ong
boîtes de thon en conserve testées par des ong

Consommateurs à risque : quels effets sur la santé ?

Le méthylmercure traverse aisément la barrière hémato-encéphalique et placentaire, impactant gravement le développement neurologique des fœtus et des jeunes enfants. Même à faibles doses, la consommation régulière de thon expose les consommateurs à des risques cardiovasculaires, rénaux, et à des effets néfastes sur le système immunitaire et reproductif. Pour un enfant de trois ans, consommer 100 grammes de thon en boîte contenant 2,7 mg/kg de mercure entraîne un dépassement de la dose hebdomadaire tolérable de 12,5 fois.

Lobbying et régulation : comment le mercure reste dans nos assiettes

Les investigations de BLOOM montrent une complicité implicite entre les décideurs européens et les industriels du thon. Le Codex Alimentarius, élaboré par la FAO et l’OMS, établit des normes alimentaires, mais il est influencé par des groupes ayant des intérêts dans la pêche thonière. Par ailleurs, le comité européen SCoPAFF, chargé de fixer les seuils de contaminants dans les aliments, reste opaque, refusant de divulguer les documents de ses délibérations. Ce manque de transparence alimente les doutes sur l’impartialité des décisions concernant la sécurité alimentaire.

Contrôles insuffisants et manque de transparence

En Europe, les contrôles sur la chaîne de production et de commercialisation du thon sont extrêmement limités. Aux Seychelles, principale base d’exportation vers l’Europe, seuls une dizaine de tests annuels sont effectués pour des milliers de tonnes de poisson. La France, pour sa part, ne prévoit pas de contrôle spécifique pour les conserves de thon, se contentant de quelques tests sur des thons frais.

BLOOM et l’ONG Foodwatch appellent à des actions urgentes : elles exigent que le seuil de mercure pour le thon soit aligné sur celui des autres espèces, à 0,3 mg/kg. Elles demandent également l’interdiction de ces produits dans les cantines, crèches et autres lieux fréquentés par des populations sensibles. En parallèle, elles lancent une pétition pour que les grandes enseignes cessent de vendre des produits présentant un risque pour la santé publique.

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