Un quart de siècle d’abus : l’affaire Mohamed Al-Fayed ébranle Harrods et la haute société


Les avocats représentant les accusatrices de Mohamed Al-Fayed, ancien propriétaire de Harrods, révèlent une vague sans précédent de nouvelles demandes. Depuis la diffusion d’une enquête accablante par la BBC intitulée Al-Fayed : Predator at Harrods, plus de 150 femmes se sont manifestées, ajoutant ainsi leur voix à celles des 37 premières plaignantes. Retour sur une affaire qui secoue les sphères du pouvoir.

Un scandale retentissant

Vendredi dernier, lors d’une conférence de presse, les avocats des victimes ont dénoncé plus de 25 ans d’abus sexuels perpétrés par Mohamed Al-Fayed. Accusé de viols et d’agressions sexuelles, cet homme, qui s’est éteint l’an dernier à 94 ans, laisse derrière lui une réputation entachée de prédations. Selon les avocats, plusieurs victimes ont déjà entamé des démarches pour se faire entendre, mais depuis la diffusion du documentaire de la BBC, de nouvelles révélations accablantes voient le jour.

« Nous avons reçu plus de 150 nouvelles demandes de renseignements de la part de survivantes et de témoins, » ont précisé les avocats. Parmi ces nouvelles voix, certaines seraient d’anciennes employées des établissements de luxe qu’il possédait, notamment Harrods à Londres et le Ritz à Paris.

Le poids du silence brisé

Au-delà des nouvelles accusations, cinq femmes affirment avoir été personnellement violées par Mohamed Al-Fayed, jetant une lumière crue sur un système de prédation étendu et complexe. Ces nouvelles révélations sont comparées aux affaires Harvey Weinstein et Jeffrey Epstein, deux prédateurs sexuels ayant utilisé leur pouvoir et leur richesse pour se livrer à des abus similaires pendant des décennies.

Ces témoignages bouleversent particulièrement les milieux mondains et économiques où Mohamed Al-Fayed était une figure influente. Son fils, Dodi Al-Fayed, avait également fait la une des journaux pour sa relation tragique avec la princesse Diana, décédée à ses côtés dans l’accident de voiture de Paris en 1997. Si ce drame a autrefois attiré l’attention mondiale sur la famille Al-Fayed, ce sont désormais ces accusations de violences sexuelles qui marquent l’héritage controversé de Mohamed.

Harrods : un symbole du pouvoir et du silence

Les avocats ont déclaré que Harrods, emblème de la fortune et de l’influence d’Al-Fayed, joue désormais un rôle inattendu dans cette affaire. Un formulaire de témoignage a été mis en ligne pour encourager les survivantes à témoigner. L’entreprise, qui a été vendue par Al-Fayed en 2010, semble vouloir coopérer pleinement avec les avocats et les autorités.

De nombreux témoins, anciens employés de Harrods et du Ritz, sont venus étoffer le dossier. Ces accusations placent en lumière l’influence et les actions d’Al-Fayed dans des lieux jusque-là synonymes de luxe et de prestige. Aujourd’hui, Harrods et les autres établissements autrefois sous son contrôle se retrouvent mêlés à une enquête d’une ampleur internationale.

Fulham FC sous le choc

Mohamed Al-Fayed ne se limitait pas aux hôtels et magasins de luxe. Propriétaire du club de football Fulham FC de 1997 à 2013, il avait également une influence dans le monde du sport. Un ancien responsable du club, Gaute Haugenes, qui a supervisé l’équipe féminine du Fulham FC de 2001 à 2003, a affirmé à la BBC que des mesures avaient été prises à l’époque pour protéger les joueuses des comportements inappropriés de leur propriétaire.

« Nous savions qu’il aimait les jeunes filles blondes, » a-t-il déclaré. « Nous avons donc veillé à ce que ces situations ne se produisent pas. Nous avons protégé les joueuses. »

Ces déclarations mettent en exergue le climat de méfiance qui régnait autour de l’homme d’affaires, même au sein de ses propres entreprises. Fulham FC, qui s’est dit « profondément troublé » par ces accusations, a exprimé son soutien aux victimes et ouvert une enquête interne pour déterminer si certains de ses employés avaient été affectés.

Vers un tournant judiciaire ?

L’enquête menée par la BBC a clairement joué un rôle catalyseur, brisant le silence qui entourait les agissements de Mohamed Al-Fayed. Si les accusations restent, pour le moment, à l’étape des témoignages, l’ouverture d’une enquête formelle pourrait suivre rapidement. Les comparaisons avec les affaires Epstein et Weinstein ne sont pas fortuites : dans tous ces cas, des hommes puissants se sont retrouvés face à un mur de témoignages accablants après avoir échappé à la justice pendant des décennies.

Cependant, avec Al-Fayed aujourd’hui décédé, une question demeure : que deviendront ces plaintes ? Les avocats travaillent d’arrache-pied pour obtenir justice pour les survivantes, mais la mort de l’accusé pourrait compliquer les procédures. La pression publique, alimentée par les médias, pourrait toutefois contraindre les institutions et entreprises ayant collaboré avec Al-Fayed à rendre des comptes.

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