Les mots de trop ? Quand Emmanuel Macron critique les dirigeants haïtiens
Les relations entre la France et Haïti sont entrées dans une zone de turbulences suite à des propos tenus par Emmanuel Macron, qualifiant les dirigeants haïtiens de « complètement cons ». Une déclaration enregistrée hors du cadre officiel et qui a provoqué une levée de boucliers à Port-au-Prince.
Une vidéo en marge du sommet du G20
Tout commence à Rio de Janeiro, en marge du sommet du G20. Une vidéo filmée de manière informelle montre Emmanuel Macron s’entretenant avec un individu l’interpellant sur la situation en Haïti. Cet échange aurait pu rester confidentiel si l’enregistrement n’avait pas rapidement circulé sur les réseaux sociaux.
Dans cette séquence, le président français défend l’ancien Premier ministre haïtien Garry Conille, démis de ses fonctions le 10 novembre, qu’il considère comme une victime d’une mauvaise décision politique. Macron n’a pas mâché ses mots :
« Le premier ministre était super, je l’ai défendu, ils l’ont viré ! Ils sont complètement cons. »
Le chef de l’État exprime ainsi son incompréhension face à une décision qui, selon lui, affaiblit encore davantage un pays en proie à une crise sans précédent.
Port-au-Prince contre-attaque : un incident diplomatique
En Haïti, les réactions ne se sont pas fait attendre. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Victor Harvel Jean-Baptiste, a convoqué l’ambassadeur de France Antoine Michon pour exprimer une protestation officielle. Une lettre adressée à Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, a également été remise.
Selon les autorités haïtiennes, les propos d’Emmanuel Macron sont jugés inacceptables et inamicaux. Le gouvernement de transition a demandé une clarification et une rectification officielle.
Un contexte explosif : la crise haïtienne
L’indignation provoquée par les propos du président français s’inscrit dans un contexte déjà tendu. Haïti traverse une période d’instabilité politique marquée par l’absence de président depuis 2021 et un Parlement dysfonctionnel.
Le récent limogeage de Garry Conille par le Conseil présidentiel de transition (CPT) a été perçu comme une décision controversée. Conille s’était opposé à des remaniements dans des ministères-clés, dénonçant une illégalité manifeste. Il a été remplacé par Alix Didier Fils-Aimé, un homme d’affaires promettant de rétablir la sécurité et d’organiser des élections, absentes depuis 2016.
Une violence généralisée
Au-delà des querelles politiques, Haïti fait face à une insécurité galopante. Les gangs armés contrôlent environ 85 % de la capitale, Port-au-Prince, selon les Nations unies. Le bilan humain est lourd : au moins 4 544 morts depuis le début de l’année, et des centaines d’enlèvements.
Cette insécurité complique les efforts pour rétablir un semblant de normalité, tandis que la population souffre également d’une crise humanitaire aiguë.
Macron persiste sur l’aide à Haïti
Lors de son discours au Chili, Emmanuel Macron a tenté de nuancer ses propos tout en réaffirmant l’engagement de la France envers le peuple haïtien. Il a souligné que la priorité reste d’aider Haïti à sortir de la spirale de violence et de chaos.
« La France continuera de soutenir les initiatives visant à rétablir la sécurité et la stabilité en Haïti. Les Haïtiens le méritent. »
Quelle suite pour les relations franco-haïtiennes ?
Alors que Port-au-Prince exige des excuses ou, à tout le moins, une clarification officielle, la France semble vouloir limiter les dégâts. L’incident souligne cependant la fragilité des relations entre les deux pays et met en lumière les tensions autour de l’ingérence perçue des anciennes puissances coloniales dans les affaires locales.
Haïti attend de la communauté internationale une aide concrète pour surmonter ses défis sécuritaires et économiques. Mais cet incident pourrait compliquer la coopération avec Paris.
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