Gaza : Le Gaz, Nouvel Enjeu de Pouvoir entre Israël et le Hamas ?

La Découverte du Gaz au Large de Gaza : Une Chance Économique pour la Palestine ?

La bande de Gaza, l’une des régions les plus instables au monde, pourrait bientôt devenir un acteur majeur de l’énergie en Méditerranée orientale grâce à la découverte de vastes gisements de gaz au large de ses côtes. Ces réserves, identifiées pour la première fois en 1999, sont aujourd’hui au centre de multiples négociations politiques, diplomatiques, et économiques. Les champs gaziers Gaza Marine 1 et 2 pourraient contenir près de 35 milliards de mètres cubes de gaz, une manne considérable pour une région en quête de stabilité. Mais au-delà des perspectives économiques, cette découverte suscite déjà de vives tensions. Israël, l’Égypte, l’Autorité palestinienne et même le Hamas, sont tous engagés dans une lutte pour le contrôle de cette nouvelle richesse, rendant la situation encore plus explosive.

Pourquoi ce Gaz Est-il si Important ?

Les réserves gazières de Gaza représentent bien plus qu’une simple opportunité économique pour la Palestine. Dans un contexte où l’électricité manque cruellement, particulièrement dans la bande de Gaza où les habitants subissent des coupures d’électricité de plus de 18 heures par jour, l’exploitation de ce gaz pourrait transformer la région. Non seulement il améliorerait les conditions de vie des Gazaouis, mais il apporterait également des revenus massifs à l’Autorité palestinienne. Pourtant, la situation est loin d’être simple. Israël a longtemps cherché à bloquer l’accès des Palestiniens à cette ressource, craignant que les revenus générés ne renforcent ses ennemis dans la région. Mais en juin 2023, un développement inattendu a eu lieu : le gouvernement israélien a donné son approbation préliminaire au projet Gaza Marine, à condition qu’il soit coordonné avec l’Égypte et qu’il bénéficie avant tout à l’Autorité palestinienne.

Israël et le Hamas : Une Coopération Sous Haute Tension

Le développement des champs Gaza Marine est loin d’être un projet purement économique. Derrière cette décision, il y a aussi une tentative de désamorcer les tensions entre Israël et le Hamas. Officiellement, seule l’Autorité palestinienne percevra les revenus du gaz. Cependant, des rumeurs laissent entendre que le Hamas pourrait également bénéficier d’une part des revenus, en échange de son rôle dans la stabilisation de la région. Cette perspective est controversée. D’un côté, Israël pourrait utiliser cette situation pour diviser les factions palestiniennes, en particulier le Hamas et le Jihad islamique, de l’autre, le Hamas y voit une chance de renforcer son pouvoir sur la bande de Gaza, tout en se distançant des factions plus radicales.

L’Accord avec l’Égypte : Un Partenaire Clé ?

Le rôle de l’Égypte dans ce dossier ne peut pas être sous-estimé. Depuis 2021, elle est l’intermédiaire principal entre l’Autorité palestinienne et Israël. En plus de cela, l’Égypte détient une part importante des infrastructures nécessaires à l’exploitation du gaz de Gaza, via l’accord passé avec le Fonds d’investissement palestinien. En 2022, Israël et l’Égypte ont signé un accord gazier permettant de renforcer leur coopération sur les exportations de gaz vers l’Europe. Cet accord inclut aussi des clauses spécifiques pour le gaz de Gaza, rendant ainsi l’Égypte un acteur incontournable dans cette équation complexe.

Gazoduc ou Confrontation ? Les Scénarios à Venir

Avec cette nouvelle richesse sous leurs pieds, plusieurs scénarios se profilent pour l’avenir de Gaza et de la région. Le premier et le plus probable serait la mise en place d’un gazoduc reliant les gisements de Gaza à l’Europe, en passant par Israël et Chypre. Cette option, déjà en discussion dans le cadre du projet East Med, pourrait offrir à l’Europe une nouvelle source d’énergie, réduisant ainsi sa dépendance au gaz russe. Cependant, la situation sécuritaire reste fragile, et un autre scénario est également envisagé : une confrontation militaire entre Israël et le Hamas, si ce dernier estime que ses intérêts ne sont pas suffisamment pris en compte dans l’exploitation des gisements.

Pourquoi les Relations avec la Turquie Comptent ?

Par ailleurs, les relations entre Israël et la Turquie, qui ont connu des hauts et des bas ces dernières années, jouent un rôle central dans la question du gaz en Méditerranée orientale. En 2021, Israël envisageait déjà la construction d’un pipeline vers la Turquie, mais les tensions politiques entre les deux pays ont mis ce projet en suspens. Aujourd’hui, alors que la situation régionale évolue rapidement, un rapprochement entre Israël et la Turquie pourrait relancer cette option, avec des conséquences majeures sur les équilibres de pouvoir dans la région.

Une Stratégie Géopolitique au Cœur du Moyen-Orient

L’exploitation des ressources gazières de Gaza ne se limite pas seulement à des questions économiques et énergétiques. Elle s’inscrit dans une stratégie géopolitique plus large, qui voit des puissances comme l’Arabie Saoudite, la Turquie, l’Égypte et même l’Union européenne s’impliquer dans la région. En septembre 2023, lors de la 78ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a clairement indiqué que l’exploitation du gaz de Gaza faisait partie d’un projet plus vaste de corridors énergétiques reliant les pays du Moyen-Orient à l’Europe. Ces corridors gaziers, qui pourraient s’étendre jusqu’à l’Inde, représenteraient un atout stratégique majeur pour Israël, lui permettant de consolider ses relations avec ses voisins arabes, tout en s’affirmant comme un fournisseur clé d’énergie pour l’Europe.

Le Hamas face à un Dilemme

Dans ce contexte, le Hamas est confronté à un dilemme de taille. Doit-il accepter de coopérer avec l’Autorité palestinienne et Israël, pour garantir une part des revenus gaziers et améliorer les conditions de vie à Gaza ? Ou doit-il, au contraire, s’opposer à tout accord, au risque de perdre une occasion historique de renforcer son influence dans la région ? Si certains leaders politiques du Hamas semblent privilégier la voie de la coopération, d’autres factions plus radicales, notamment les Brigades Al-Qassam, restent opposées à toute forme de compromis avec Israël, et envisagent même une escalade militaire pour défendre ce qu’ils perçoivent comme leurs droits sur les ressources de Gaza.

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