Un virus en expansion qui inquiète les éleveurs
La fièvre catarrhale ovine (FCO), communément appelée « maladie de la langue bleue », resurgit en France avec l’apparition d’un nouveau sérotype, le sérotype 3. Cette pathologie, transmise par des moucherons piqueurs, dévaste les élevages ovins et inquiète profondément les agriculteurs. Le sérotype 8, déjà présent en France depuis 2006, continue de sévir dans le sud du pays, tandis que le sérotype 3 a récemment fait son entrée dans le Nord, menaçant les cheptels non immunisés. L’impact de cette maladie, bien que non transmissible à l’homme, est dévastateur pour les animaux infectés et les exploitations touchées.
Situation actuelle : propagation et foyers détectés
Le 5 août 2024, le premier foyer de FCO de sérotype 3 a été confirmé dans un élevage ovin à Marpent, dans le département du Nord. Cette découverte fait suite à une progression inquiétante de la maladie, précédemment détectée en Belgique, à quelques kilomètres de la frontière française. Des suspicions de contamination dans d’autres élevages du Nord et de l’Aisne sont actuellement en cours d’analyse. Selon Simon Ammeux, président de la FRSEA Hauts-de-France, des cas suspects ont également été signalés en Seine-et-Marne, ce qui renforce l’inquiétude quant à la propagation du virus.
Parallèlement, dans le sud de la France, le sérotype 8 continue de faire des ravages, notamment dans les Pyrénées-Orientales, l’Aude et l’Ariège. Myriam Cormary, directrice de la chambre d’agriculture des Pyrénées-Orientales, rapporte que la FCO a déjà entraîné la mort de 4 000 brebis, avec un chiffre potentiellement en augmentation d’ici la fin du mois. Malgré ces pertes massives, aucune donnée nationale complète n’a encore été communiquée, laissant les éleveurs dans l’incertitude quant à l’ampleur réelle de la crise.
Pourquoi cette maladie est-elle préoccupante ?
La FCO est une maladie virale qui affecte tous les ruminants, domestiques ou sauvages. Bien que les humains ne soient pas concernés, les conséquences pour les animaux sont sévères. Les moutons, en particulier, souffrent de symptômes variés, allant de la fièvre à des troubles respiratoires, en passant par une langue pendante, souvent bleutée, et des pertes de petits en gestation. Ces symptômes peuvent entraîner la mort de l’animal ou des séquelles graves, comme un ralentissement de la croissance ou la stérilité.
L’apparition du sérotype 3 en France est particulièrement inquiétante car les cheptels français n’ont jamais été exposés à ce type de virus. Cela signifie qu’aucune immunité naturelle n’a été développée, rendant les animaux extrêmement vulnérables. De plus, la transmission de la maladie par des moucherons culicoïdes, dont le développement est favorisé par des températures élevées, augmente le risque de propagation rapide, surtout pendant les mois d’été.

Les mesures de lutte : prévention et vaccination
Face à cette menace, les autorités françaises ont réagi en instaurant des mesures strictes de prévention. Le ministère de l’Agriculture a ainsi créé une zone « régulée » allant du Pas-de-Calais à la Moselle, où les déplacements de bovins, de chèvres et de moutons sont soumis à des restrictions. Ces mesures visent à limiter la propagation du virus et à protéger les élevages encore épargnés.
En l’absence de traitement curatif pour la FCO, la vaccination devient un outil essentiel pour contrôler la maladie. Une campagne de vaccination « volontaire » a été annoncée par le ministère, avec un vaccin mis gratuitement à disposition des éleveurs à partir du 14 août 2024. Les vétérinaires sanitaires seront chargés de fournir le vaccin, qui pourra ensuite être administré directement par les éleveurs à leurs animaux. Une deuxième livraison de vaccins est prévue pour le 31 août, visant à couvrir l’ensemble de la zone régulée et à réduire les signes cliniques chez les animaux contaminés.
Impacts économiques : un lourd fardeau pour les éleveurs
Au-delà des pertes animales, la FCO représente un fardeau économique considérable pour les éleveurs. Outre la mortalité directe, la maladie entraîne des avortements, des retards de croissance et la stérilité, ce qui affecte la rentabilité des exploitations. Les restrictions de déplacement imposées par les autorités, bien que nécessaires, compliquent également la gestion des troupeaux et la commercialisation des produits d’élevage, augmentant les coûts et réduisant les marges bénéficiaires.
Les éleveurs se retrouvent ainsi confrontés à une double peine : la perte de leurs animaux et une diminution des revenus, dans un contexte où la viabilité de nombreuses exploitations est déjà fragilisée par d’autres crises agricoles. Cette situation pourrait mener à des abandons d’activités et à des difficultés accrues pour les professionnels du secteur, déjà éprouvés par des défis sanitaires et économiques répétés.
Vers une zootopie ? Les risques à venir
La propagation du sérotype 3 de la FCO en France pourrait annoncer une nouvelle zootopie, une épidémie animale de grande ampleur. Les autorités surveillent de près l’évolution de la situation, notamment à la frontière belge, où le virus continue de se propager à un rythme alarmant. En Belgique, le nombre de foyers a récemment explosé, atteignant 308 cas confirmés, ce qui laisse craindre une progression similaire en France.
La prévention reste le principal rempart contre une telle épidémie. Les mesures de désinsectisation des fermes, la quarantaine des exploitations touchées et la vaccination massive sont autant de stratégies mises en place pour endiguer la propagation du virus. Cependant, l’efficacité de ces mesures dépendra largement de la rapidité et de la coordination des actions à l’échelle nationale et internationale.